September 21, 2023 | Successions

Mon instrument de travail devra-t-il être vendu après mon divorce ?

La réponse courte à cette question est « non.» Pour comprendre pourquoi les instruments de travail sont protégés en cas de divorce ou de séparation, il faut savoir si vous avez un contrat de mariage. Dans la négative, il faut comprendre la notion de société d’acquêts et ce qu’elle comporte. La société d’acquêts est à la fois un régime matrimonial et un régime d’union civile. Depuis le 1er juillet 1970, à la suite d’une réforme du droit de la famille, la société d’acquêts est le régime légal par défaut au Québec pour les couples qui n’ont pas signé de contrat de mariage ou d’union civile.

Sous ce régime, vos biens appartiennent à l’une des deux catégories suivantes : les acquêts et les biens propres. L’article 450 du Code civil du Québec (C.c.Q.) énumère les biens qui constituent des biens propres. Chaque époux conserve ses biens propres, tandis que les acquêts font l’objet d’un partage et sont généralement partagés en parts égales entre les époux. L’alinéa 6 de l’article précité énonce « les instruments nécessaires à l’exercice de la profession de l’époux, à l’exception de la rémunération, s’il y a lieu. » Les instruments de travail constituent donc des biens propres et ne sont pas soumis au partage.

Le critère de base est que l’instrument de travail doit être nécessaire à l’exécution de la profession de l’individu. Dans le cas d’un véhicule utilisé par un individu pour conduire son taxi, le véhicule et le permis de taxi devraient être utilisés fréquemment et pendant de longues périodes pour être considérés comme un instrument de travail. De plus, la Cour d’appel du Québec a statué dans l’affaire Droit de la famille – 113877[1], que la voiture de taxi et son permis correspondant ne pouvaient être considérés comme des instruments de travail en vertu de l’article 450(6) C.c.Q. parce que l’individu ne travaillait plus comme chauffeur de taxi au moment de la séparation. Il est donc clair que l’instrument de travail doit non seulement être nécessaire à l’exercice de la profession mais doit également être encore utilisé pour la profession au moment de la séparation. Il est également entendu qu’un véhicule ne sera probablement pas considéré comme un instrument de travail si l’un des ex-conjoints utilise le véhicule occasionnellement pour des courses Uber en tant que source de revenus secondaire.

D’autres exemples d’instruments de travail qui constituent des biens propres sont les instruments de musique utilisés par l’un des conjoints dans le cadre de sa carrière de musicien, de professeur de musique ou d’autres professions qui nécessitent l’utilisation d’un instrument de musique. Sur la base de la jurisprudence applicable, un instrument de musique tel qu’un piano qui se trouve dans la résidence familiale et qui est utilisé par l’un des conjoints pour des leçons de piano ne serait pas automatiquement considéré comme un bien propre. Les leçons de piano doivent être une profession à temps plein et non une source de revenus secondaire où le piano n’est utilisé que quelques heures par jour ou exclusivement durant les fins de semaine. Dans ce cas, le piano serait considéré comme un acquêt et ferait l’objet d’un partage entre les époux.

[1] 2011 QCCA 2248, https://canlii.ca/t/fp7xf

Dans le cas d’un instrument de travail acheté pendant le mariage ou l’union civile et où des fonds privés et des fonds communs ont été utilisés, le partenaire qui revendique l’utilisation professionnelle de l’instrument serait tenu de verser une compensation à l’autre conjoint. Ceci afin d’atténuer la perte de la valeur de l’instrument qui n’est plus partageable et de tenir compte de la contribution présumée des deux parties à l’achat de l’instrument puisqu’il a eu lieu pendant l’union et n’a pas été acheté uniquement avec des fonds privés.

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